Quand le mot partisan avait un sens
On l'a d'abord chantée comme les bolchéviques,
Cette chanson d'espoir qui déchire le cœur.
Elle venait tout droit de l'Union Soviétique
Et repose au musée de la Légion d'Honneur.
Kessel et son neveu Druon, un soir à Londres,
Ont traduit en français les vers d'Anna Marly;
Alors on vit la France à la France répondre,
Par ce chant réveillant l'Honneur et la Patrie...
A travers les barreaux, comme à travers les murs,
S'éleva vers le ciel le Chant des Partisans...
Défiant la gestapo, ses bourreaux, ses tortures,
Chuchoté, puis chanté, par tous les résistants.
Malraux, au Panthéon, lors du transfert des cendres
Du Préfet Jean Moulin, sous une pluie à verse,
L'a entonné pour, lui un matin de Décembre,
Le citant pour exemple à toute la jeunesse.
La France avait connu des heures effroyables
Et s'était résignée devant la barbarie,
Mais certains de ses fils demeuraient indomptables,
Refusant le destin qu'avait bradé Vichy.
Le sceptre est condamné à céder sous l'archet
Quand la troupe bottée plie devant la chorale.
"Descendez au cercueil" dictateurs et valets,
Le chant des partisans domine la bataille :
" Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines ?
Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu'on enchaîne ?
Ohé ! partisans, ouvriers et paysans, c'est l'alarme !
Ce soir l'ennemi connaîtra le prix du sang et des larmes. "
J'ai pleuré si souvent en entendant cet air
Qu'il a gardé pour moi le gout salé des larmes :
Il est le sacrifice, accepté par nos pères,
Pour que jamais leurs fils n'aient à prendre les armes.
Portons au Panthéon tous ces soldats de l'ombre :
Geneviève de Gaulle et Germaine Tillion,
Brossolette et Jean Zay, héros des années sombres,
Pour que leur soit rendu l'amour de la nation.
Bernard Reygrobellet