Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Toute la gauchiasse dans ce dico!

Un dictionnaire des idées reçues adapté à notre temps.

Par Claude Robert.

Nous vivons une époque formidable. Ce n’est d’ailleurs pas tant l’époque actuelle qui se distingue par ce que l’on pourrait qualifier de « l’épaisseur ». Ce serait plutôt le « politiquement correct » qui l’a infiltrée. C’est même plus que de l’épaisseur. On pourrait parler d’empâtement, voire de bouffissure. Mais pour ceux qui n’auraient pas la chance de se rendre compte de l’existence de cette infâme moraline glucosée, voici heureusement un petit lexique qui devrait très vite y remédier :

Austérité/Rigueur : ce concept est tellement fin qu’il est inconnu de la plupart des économistes. Et pourtant, on ne parle que de lui en ce moment. Pensez-vous, il fut un temps lointain pendant lequel on croyait bêtement que l’on ne pouvait dépenser que ce que l’on possédait. Et qu’en cas de ruine, il fallait faire disette. Qu’est-ce que c’était stupide. Heureusement, cette période idiote est révolue. De quel droit quelqu’un qui n’a plus d’argent devrait-il se serrer la ceinture par rapport à quelqu’un qui en est pourvu ? De quel droit un pays qui se serait ruiné devrait-il vivre moins bien qu’un pays qui se porte bien ? N’est-ce pas de la discrimination ? Voire même de la stigmatisation ? Et si jamais vous vous demandez « qui va payer ? » sachez que vous n’êtes qu’un pisse-vinaigre. Car rien ne doit s’opposer à la satisfaction immédiate et constante du désir mimétique si cher à R.Girard. Surtout, si quelqu’un vous dit qu’austérité et rigueur ne sont que de purs produits de la morale actuelle, des sortes d’hybrides issus du croisement du refus de stigmatiser et du rejet du monde de la finance, et qu’ils constituent de ce fait les virus les plus toxiques de la pensée actuelle, dites-vous bien que cette personne est forcément un économiste mal intentionné.

Bonne gestion : voir Impensé ou Tabou.

Chômage : mal endémique propre aux pays libéraux ou capitalistes anglo-saxons. Ne dites surtout pas qu’avec ses 10,3% la France est son royaume, car ce serait un sacrilège. Exercez plutôt votre haine sur les États-Unis (5,5%), l’Angleterre (5,4%) ou l’Allemagne (4,7%). Et si on insiste auprès de vous sur l’origine de telles différences, alors répliquez que c’est parce qu’elle mène une politique encore plus ultra-libérale que les autres que la France en est là.

Démocratie : système politique basé sur la possibilité laissée au peuple de valider lors des élections les promesses qui lui sont faites par la classe politique. Si quelqu’un avait tout de même la grossièreté de trouver des exemples récents de promesses mirobolantes qui auraient gravement induit le peuple en erreur, objectez qu’il est odieux de stigmatiser celui-ci. Si on vous répond que les hommes politiques sont des menteurs, et que ce n’est pas non plus le fonctionnement normal de la démocratie, rétorquez qu’il est tout aussi odieux de stigmatiser les dirigeants. Ils font ce qu’ils peuvent, avec le peuple qu’ils ont. Et si jamais votre contradicteur vous agace avec ses doutes quant à la véracité d’une démocratie basée sur la manipulation d’un peuple désinformé par une classe politique perfide et endogame, alors insultez-le en l’accusant de promouvoir le vote censitaire. Ainsi vous aurez le dernier mot.

Finance/Monde de la Finance : lubie toxique qui ne cesse de vouloir se rendre incontournable alors qu’elle n’est que la domination des plus pauvres par les plus riches, domination purement fortuite et virtuelle dont on peut se débarrasser très facilement. Il suffit tout simplement de le vouloir. Et si jamais quelqu’un vous glisse dans l’oreille que ce n’est pas faute d’avoir voulu ni même essayé que la Grèce s’est cassée les dents sur ce monde-là, répondez que ce pays n’a pas eu de chance. Ce n’était pas le bon moment, la météo n’était pas propice. La prochaine fois sera la bonne et la Finance sera définitivement clouée au pilori.

Front de Gauche : réservoir potentiel pour le lieu géographique où s’exercent le Bien et la Finesse. Voir Parti Socialiste.

Front National : lieu géographique où s’exercent le Mal et la Vulgarité Sociale.

Impensé : voir Tabou.

 

Keynésianisme : LA solution à tout. Cette théorie de J.M.Keynes initialement dédiée au traitement des problèmes d’insuffisance de la demande est mise à toutes les sauces, y compris pour résoudre les problèmes d’insuffisance de l’offre. Pourquoi donc ? Mais bien évidemment parce qu’elle a fait la preuve de son efficacité. La France ferait-elle du keynésianisme depuis les années 1980 si ça ne marchait pas ? Voyons ! Bon, certains experts susurrent que redynamiser l’offre exige tellement plus d’efforts et de courage politique que cela a méchamment desservi cette solution. Mais ils ont parfaitement raison ! Pourquoi devrions-nous expérimenter des solutions qui ne sont efficaces qu’au prix d’un terrible inconfort ? N’y a-t-il pas suffisamment le choix parmi les solutions agréables ? Sinon, ne peut-on pas attendre encore une décennie ou deux ?

Libéralisme : la cause de tous les maux de la planète : pauvreté, pollution, violence, exclusion. Est confondu avec le capitalisme et souvent affublé du préfixe ultra pour le bien-être de tous. Surtout, n’écoutez pas les fredaines de la World Bank ou du FMI comme quoi le nombre de pauvres diminue et le nombre de riches augmente. Ces chiffres sont faux. Répondez que les humains vivaient bien évidemment beaucoup mieux au Moyen Âge ou pendant l’Antiquité. Et si par mégarde quelqu’un osait brandir l’argument du progrès technologique, faites-lui dire que vous vous en passeriez bien volontiers.

Parti Républicain : abus de langage consistant à s’approprier les valeurs de la République dans des buts bassement politicards.

Parti Socialiste : lieu géographique où s’exercent le Bien et la Finesse. Cet exercice peut se réaliser dans les faits, ou, le cas échéant, par le Verbe. Il EST par essence, et ceci définitivement. Ontologiquement, il ne peut donc être ni remis en cause ni même dépassé par mieux que lui. Et comme il EST le Bien, c’est au réel de s’adapter à lui et non pas l’inverse.

Politique de relance : voir Keynésianisme.

Réformes: au commencement, ce mot véhiculait des notions principalement positives de changement, d’évolution, d’espoir de se diriger vers des jours meilleurs. Actuellement, ce signifiant se charge de plus en plus de connotations puantes qui proviennent d’un paradigme infréquentable : celui des réformes libérales et de l’austérité. Gageons que ce mot aura donc perdu tout son potentiel de rêve d’ici quelques mois ou années. Au train où vont les choses, il rejoindra très vite la clique des gros mots. Puis il s’enfoncera lentement dans la trappe obscure des impensés.

Relance de la demande : voir Keynésianisme.

Relance de l’offre : inconnu. Voir Keynésianisme.

Responsable/Responsabilité : enfant pervers de la stigmatisation. Qui nomme un responsable le stigmatise ! Qu’on se le dise, il n’y a de responsabilités que collectives. Ainsi, c’est moins pénible à supporter puisque l’inconfort de la stigmatisation se dilue dans le nombre. Tout de même, si on vous chagrine en combinant ces notions avec le mot peuple, objectez qu’en linguistique politique, il existe des syntagmes impossibles. On ne peut pas stigmatiser un peuple. Le peuple a toujours raison. Il est souverain, même et surtout lorsqu’il n’a rien compris à ce qui lui arrive. Voir Démocratie.

Riches/Puissants: cas particulier, exception notable dans le lexique du Politiquement Correct. Et pour cause, les Riches et les Puissants sont les seuls que l’on puisse actuellement stigmatiser. Et si vous n’en êtes pas encore sûr, sachez que cette stigmatisation est même fortement recommandée. Au pinacle du hit parade des têtes de turcs et autres boucs émissaires du moment se trouvent le FMI, l’Euro-groupe et les Banques. Détestons-les ! Montrons-les du doigt !

Stigmatiser : le mal absolu. À éviter à tout prix sous peine de passer pour un facho sans cœur, un monstre de méchanceté, un beauf inculte. Bien évidemment, les psychologues diront que ne jamais stigmatiser peut finir par ouvrir la porte à tous les abus ; les juristes que cela préfigure la fin du droit ; les philosophes que c’est l’avènement du relativisme le plus tordu. Mais ils se trompent. Pourquoi leur point de vue serait-il meilleur ? Qu’est-ce qu’ils en savent ?

 

Tabou : voir Impensé

Claude Robert est consultant international en organisation, et auteur du site satirique “Eradiquons le politiquement correct français“

Les commentaires sont fermés.