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Les morts les plus idiotes de l’histoire

Une chose parait certaine, la mort idiote remonte à une lointaine antiquité.

Le sujet n’est pas neuf, il a été traité au XVIe siècle par l’humaniste Ravisius Textor et plus récemment dans un ouvrage intitulé La Tortue d’Eschyle [1]

Jusqu’au XVIIIe siècle, la mort idiote était un privilège des grands de ce monde, du moins on ne recensait que les morts illustres. Depuis, avec les progrès de la démocratisation, de plus en plus de gens connaissent une " mort à la con " ou plus exactement on les porte désormais très facilement à notre connaissance, d’où ces nombreux sites qui en font des recensions plus ou moins exhaustives.

Nous n’avons retenu volontairement que des décès antérieurs à 1900, liste aussi subjective qu’incomplète comme il se doit.

Une chose parait certaine, la mort idiote remonte à une lointaine antiquité. Amar-Sin (2046-2038 av.J-C) roi de la IIIe dynastie d’Ur (au sud de l’Irak actuel) s’était proclamé " dieu soleil du pays " mais devait mourir d’une ampoule infectée causée par sa chaussure. Toujours en Mésopotamie, mais un peu plus tard, en 1860 avant notre ère, Erra-imitti, roi d’Isin, redoutant la colère des dieux, crut habile d’installer Enlil-bâni, le jardinier comme " substitut royal " sur son trône espérant détourner le courroux divin en faisant exécuter quelque temps plus tard le " bouc émissaire ". Mais le roi mourut " en avalant une soupe trop chaude " et le jardinier " qui occupait le trône ne le rendit pas " !

Sans doute faut-il continuer par la mort la plus pitoyable qui soit : celle d’un grand soldat toujours prêt à exposer sa vie dans les combats. Pyrrhus se battait dans Argos et s’apprêtait à frapper un Argien qui avait tenté en vain de lui porter un coup de javeline paré par la cuirasse épaisse du roi quand la mère du soldat qui suivait le combat depuis le toit de sa maison, voyant son fils en péril, lança une tuile sur la tête du roi. C’est ainsi que périt, en 272 avant notre ère, le roi d’Epire et pourtant un des meilleurs capitaines de l’Antiquité, mais qui n’avait sans doute pas prévu cette tuile.

Dans l’Antiquité, il est vrai, on recevait beaucoup de choses sur la tête[2] : Eschyle, le grand tragédien, mourut d’une tortue vivante reçu sur le crâne expédiée, dit-on par un gypaete barbu à la vue basse qui aurait confondu sa superbe calvitie avec une pierre. C’est vraiment nous prendre pour des buses. Claudius Drusus, fils de l’empereur Claude, lui, s’était étouffé avec une poire qu’il avait lancée en l’air pour montrer son habileté à la rattraper avec la bouche : sans doute une démonstration de la sélection naturelle chère à Darwin.

Au Moyen-Âge, on préférait aller directement au fait. En 1498, Charles VIII trop pressé d’aller jouer au jeu de paume, heurtait avec toute la fougue du sportif le linteau d’une porte du château d’Amboise. Il en mourut, au grand étonnement des contemporains, qui ne pensaient pas qu’il avait grand-chose dans le crâne.

Ce n’était pas le premier roi à se fendre le crâne : en 882, le jeune carolingien Louis III poursuivant à cheval une jeune fille rétive à ses charmes devait heurter violemment un linteau de porte trop bas. C’est ainsi que l’amour lui fit perdre la tête.

Si les linteaux sont fatals aux rois français, le melon n’a jamais réussi aux Habsbourg : Frédéric III en 1493 et Maximilien 1er en 1519 succombèrent tous deux à une indigestion.

Si le ridicule n’a jamais tué personne, le rire, lui, peut être mortel : le stoïcien Chrysippe de Soles voyant un âne manger les figues destinées aux invités à un banquet auquel il était convié, en est mort de rire. Mais on ne sait s’il est mort de ne pas être resté stoïque, d’avoir découvert l’imbécillité de son école philosophique, ou de s’être reconnu dans l’âne qui lui faisait face. Un roi birman, Nandabayin fut pris d’une crise de fou rire inextinguible et mortel en apprenant que Venise était une république et n’avait pas de roi (1599). Comme quoi, la république est toujours fatale aux rois.

L’eau est dangereuse pour la santé : tous les buveurs vous le diront. L’histoire ne le prouve que trop abondamment.

En 1190, l’empereur Frédéric Barberousse en route pour la Terre sainte, dans le cadre de la Troisième croisade, eut l’idée de se rafraichir dans le Saleph (actuel Göksu Nehri). L’idée en soi n’était pas mauvaise sous l’écrasante chaleur du mois d’août ; encore fallait-il éviter de le faire en armure : l’hydrocution lui fut fatale.

Gian Luigi Fieschi, connu en France par l’ouvrage du cardinal de Retz comme le comte de Fiesque, méditait de renverser Andrea Doria, le " protecteur " de la république de Gênes, en provoquant une révolte populaire. Ce 2 janvier 1547, tout avait été prévu et tout paraissait réussir aux conjurés : Doria était en fuite, Fieschi n’avait plus qu’à monter sur une galère et le tour était joué. Mais la planche était glissante, ou savonnée, et le comte tomba à l’eau et se noya. C’est ainsi que la conjuration du comte Fieschi tourna au fiasco.

Le verre d’eau glacée avalée après une forte transpirée est semble-t-il à éviter. Il devait emporter le brave Bertrand Du Guesclin tout comme l’insignifiant dauphin, fils aîné de François 1er.

Après l’eau, le feu: en 1766, le roi Stanislas, monarque déchu de Pologne devenu duc de Lorraine par la grâce de son gendre Louis XV, se réchauffait devant sa cheminée quand le feu prit à sa robe de chambre. Disparaitre dans les flammes était logique pour un prince éclairé mais c’était tout de même une drôle de façon de s’éteindre.

Parmi les morts idiotes, celle de Tycho Brahé tient une bonne place. Invité par l’empereur Rodolphe II de Habsbourg à un banquet, l’astronome danois, en exil à Prague, souffrait depuis longtemps de problème de vessie. Mais le banquet s’éternisait et le pauvre avait, depuis un bon moment, une furieuse envie de se soulager. Les Habsbourg, aussi lunatiques soient-ils, étaient des maniaques de l’étiquette et Brahé n’osait pas sortir pour assouvir son besoin si pressant. Enfin, on se leva de table. Trop tard pour Brahé qui n’arrivait plus ni à uriner ni à faire disparaître l’insupportable douleur. Il devait connaitre dix jours d’agonie, veillé par son fidèle disciple Kepler, non sans avoir choisi son épitaphe : " Il a vécu comme un sage et est mort comme un fou ". Ainsi disparaissait une étoile au firmament de l’astronomie.

Nombre de compositeurs ont connu une fin étrange et ridicule. La plus frappante est sans doute celle de Jean-Baptiste Lully en 1687 dont la canne un peu trop fermement agitée en battant la mesure lui écrasa un orteil alors qu’il dirigeait la répétition de son Te Deum[3]. Le pied infecté, la gangrène s’en mêla même si trois mois s’écoulèrent avant la mort de l’illustre surintendant de la musique du Roi.

Parmi les 140 hypothèses sur la mort de Mozart, on n’a guère retenu celle qui l’attribue à une mauvaise chute dans les escaliers : en effet, peut-on imaginer qu’un compositeur qui avait réussi musicalement tant de marches ait pu en rater une à ce point ?

Mieux documentées sont les morts de deux musiciens français de moindre envergure, Alkan et Chausson. Charles Valentin Alkan (1813-1888), surnommé le " Berlioz du piano ", fin lettré et subtil talmudiste, avait la passion des livres. C’est en essayant d’attraper l’un d’eux qu’il provoqua la chute de sa bibliothèque. Il est rare d’être à ce point écrasé par la somme de ses connaissances. Ernest Chausson, qui composait peu mais bien, est mort à 44 ans d’un accident particulièrement stupide en faisant du vélo dans la propriété d’un ami, ratant le virage mais pas le mur d’enceinte !

De tout temps, le sexe a été source de périls. La mort célébrissime de Félix Faure, surnommé " le président Soleil ", en témoigne assez. Le Président de la République recevait régulièrement les visites de Marguerite Steinhell, qui lui prodiguait les gâteries dont raffolait le galant séducteur grisonnant. Mais ce 16 février 1899, la jeune femme mit trop de cœur à l’ouvrage au point de faire lâcher celui de son présidentiel amant. Les mains présidentielles s’étant crispées sur la chevelure de la belle, il fallut recourir aux ciseaux pour la libérer : dans la précipitation, elle filait par une porte dérobée en oubliant son corset. Elle devait y gagner le surnom de " Pompe funèbre " tandis que Clémenceau lâchait le mot fameux: " Il a voulu vivre César, il est mort Pompée ".

Ainsi vous voilà prévenu, évitez de lire des livres, d’être trop poli, de prendre la porte, de boire de l’eau, de faire du vélo, de vous réchauffer comme de vous rafraichir, de faire l’amour, d’aller au bord de la mer et surtout, évitez les tuiles en tous genres, si vous voulez vivre vieux.

contrepoint.org

 

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